Gotan Project

Barcelone - Espagne [Palau De La Musica Catalana] - mardi 16 décembre 2008

Pour ma dernière nuit dédiée à la musique à Barcelone, je me devais de finir par de l´exceptionnel. Sans aucune surprise, cette ville passionnée, foisonnante, profondément vivante me fera une dernière fois un splendide cadeau.
Ce sera donc Gotan Project qui se chargera de sceller mes adieux avec la capitale catalane, et ce dans le Palau de la musica catalana. Et je ne pouvais pas rêver mieux. Le tango, musique tragique emplie de la nostalgie des immigrés, correspond parfaitement à mon état d´esprit en cette fin de période d´expatriation.
Et pour une fois, je ne me retrouve pas dans les salles underground de Barna.
Le Palau de la musica catalana est un véritable monument, classé au patrimoine mondial de l´UNESCO, et qui fête ses cent ans cette année. Il a ainsi été construit en plein pendant la glorieuse période moderniste, mais son architecture diffère de celle de Gaudí. On y retrouve l´exubérance, mais le côté onirique de célèbre Catalan disparaît au profit de mosaïques et de dorures baroques, véritablement époustouflantes. Je me retrouve donc assis au milieu de cette salle, entouré de latins de tous âges et de tous niveaux de vie, dans ce haut lieu du patrimoine culturel catalan. Et j´avoue que cela m´émeut : Le Palau est un témoignage d´une période oubliée de l´histoire catalane, celle de l´autonomie sous la première République, l´apogée de la région (pays ?), aussi bien culturelle qu´industrielle.

Le concert a donc débuté de façon étonnante. Le groupe vêtu tout de noir est caché derrière un rideau sur lequel des images sont diffusées, des films montrant des danseurs ou des rues désolées de Buenos Aires, entre autres. On distingue Cohen-Solal et Müller au fond, derrière leur machines, le guitariste Eduardo Malakoff et bien sûr le bandonéoniste. J´adore la position prise pour jouer de cet instrument de virtuose : un pied sur une marche, l´accordéon posé sur le genou.
Et en cette période de crise violente en Occident comme dans le Tiers-Monde, Gotan Project renoue avec l´aspect politique de leur premier album, ce cri de l´Argentine ruinée de 2001. Les paroles de Castro et Eva Perón retentissent sur les airs de "Queremos Paz" ("Nous voulons la paix") et "El Capitalismo Foráneo" ("Le capitalisme étranger"). L´acoustique est parfaite : les rythmes électroniques appuient parfaitement les plaintes déchirantes du Bandonéon. L´ambiance installée est saisissante de gravité, et le public reste silencieux pour mieux profiter de ces cris de détresse. L´engagement du groupe s´approfondit, avec un sample de "Assassin de la police" introduisant le génial "Época" ou la chanteuse portègne Veronica Silva vient chanter. C´est d´ailleurs à ce moment que l´instrumentation s´enrichit, avec l´ajout d´un piano, trois violons et un violoncelle. Cette première partie de set sombre se poursuit jusqu`à "La Del Ruso", oú deux danseurs surgissent devant le rideau pour faire une superbe démonstration de cette danse incroyable, oú les jambes s´entremêlent, les bustes se tancent dans un intense jeu de séduction. Le groupe sort alors de scène, alors que le rideau se décroche.

Quelques minutes après, il revient tout de blanc vêtu, alors que l´introduction à la basse de "Diferente" retentit. Sans aucune surprise, cela sera un des sommets du concert, peu étonnant quand on connaît ce morceau exaltant. Cette partie de concert sera plus lumineuse, quoique toujours mélancolique. Le groupe enchaîne les interprétations impeccables. On atteint des sommets de complicité avec le public quand la chanteuse Cristina Vilallonga, Barcelonaise, vient chanter sur "Amor Porteño" et "Notas". Sur "El Norte", un tambour tribal vient rythmer ce morceau incroyable, véritable chevauchée dans la Patagonie (D´ailleurs, ce sont des images de cette région hostile qui sont diffusées pendant le morceau), succédant à l´hommage à Buenos Aires qu´est "Santa María (Del Buen Ayre)", du nom traditionnel de la capitale argentine. Les deux danseurs reviennent régulièrement, notamment sur une reprise d´un tango traditionnel, "Callazo en paris".

Mais sur les rappels, on atteindra des sommets mirifiques. "Criminal" se révèle aussi dansante sur ses couplets que déchirante sur ses refrains, et une transition impeccable introduit le fantastique "Tríptico", impressionnant de maîtrise instrumentale, avec un jeu de guitare sèche sidérant, et un solo de violon aussi strident que mélodieux en conclusion.
Le groupe ayant épuisé tout son répertoire, je m´apprête à sortir des étoiles pleins les yeux, mais à mon grand bonheur, ils effectuent un second rappel, en forme d´hommage à celui dont l´ombre a plané toute la soirée sur le Palau de la musica catalana, j´ai nommé le génie Astor Piazzolla. Et c´est évidemment le célèbre "Libertango", chanté en français, qui conclura cette merveilleuse soirée, le tout avec un dernière danse de tango. Le groupe reste ensuite plusieurs minutes sur scène, devant une standing ovation méritée.

Quelle soirée merveilleuse. Pour moi, cela a été plus que de la musique. Certes, la prestation était excellente. Mais voir cela dans un contexte si latin oú tout le monde parlait en catalan, dans un salle si splendide a rendu l´expérience magique. Je me sentais dans un autre monde, loin de la culture anglo-saxonne, de la culture mondialisée. Car oui, il existe une alternative : l´Espagne et l´Amérique du Sud nous le montrent en conservant leur spécificité culturelle. Le temps d´une nuit, c´est toute une époque qui a vécu de nouveau entre les murs du Palau de la musica catalana. Et le tango, la douleur de l'immigration apaisée par le jeu de la séduction, cela me parlait tellement...
Et la musique ne s´arrête jamais à Barcelone : j´ai pu dans la même nuit assister à un Djset de M.A.N.D.Y. dans un club ouvert à cent personnes. Quelle conclusion de séjour pour le provincial que je suis !

"Gracias por todo Barcelona, que no es un adios, solo un hasta luego!"


Intemporel ! ! !   20/20
par Vamos


  Setlist :

Quermos Par
El Capitalismo Foráneo
Vuelvo Al Sur
Época
Une Música Brutal
La Del Ruso
Diferente
La Vigüela
Amor Porteño
Notas
Lunático
Mi Confesión
Callazo En Paris
Santa María (Del Buen Ayre)
El Norte
>>>>>>>>>>
Criminal
Tríptico
>>>>>>>>>>
Libertango (Astor Piazzolla)


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