Conor Oberst
Outer South |
Label :
Merge |
||||
Mettons tout d'abord les choses au point si vous le voulez bien : ce disque est l'oeuvre d'un vrai groupe, appellé Conor Oberst & The Mystic Valley Band, et non le deuxième album solo de Mister Oberst comme cela a pu être présenté ça et là. Cette nouvelle livraison est bien moins un album solo que les disques publiés sous le nom de Bright Eyes, qui consistaient en fait en Conor Oberst chantant, composant et jouant à peu près tous les instruments, seulement épaulé dans les arrangements et l'instrumentation par son ami Mike Moggis.
Pour cet album, comme pour le précédent, exit Mike Moggis et bienvenue le Mystic Valley Band. Oberst dit avoir composé Outer South avec ses nouveaux amis lors de la dernière tournée en leur compagnie, sur la route donc. Et on ressent en effet immédiatement que ce qui nous est présenté ici est beaucoup moins introspectif et mélancolique que ce que notre petit génie a pu publier par le passé. Lui qui s'était spécialisé dans les ballades guitares-voix mélancoliques (ou dans l'expérimentation électro-rock voisine de la new-wave (voir Digital Ash In A Digital Urn)) avec des textes très personnels et particulièrement déprimés tente depuis I'm Wide Awake It's Morning, peu à peu, progressivement, de toucher à une universalité qui dépasserait les étroits carcans du folk indie.
Ici l'ambiance est tantôt country, tantôt power-pop, tantôt rock sudiste et tantôt folk. Cet album, c'est l'album sudiste du groupe, celui qui sonne américain comme jamais. Et c'est aussi un joyeux bordel que l'on tâchera de disséquer.
Première grosse surprise : Oberst a carrément laissé les "autres" composer et chanter sur certains morceaux. Le résultat est donc, comme on pouvait le prévoir, assez hétérogène, et va de l'excellent au médiocre.
Commençons tout d'abord par le brasier rock'n'roll qu'est Roosevelt Room, digne du meilleur des Stones mêlé au meilleur du Allman Brothers Band. Un truc qui déchire complètement, laissant l'auditeur pantois devant tant de savoir-faire rock'n'roll pur et dur en ces temps de musique bâtarde. Ici la place est laissée aux solos de guitares agressifs et distordus, aux claviers en folies et aux hurlements du petit Oberst, étonnamment à l'aise dans ce registre.
Autre moment fort du disque : le sublime et émouvant "I Got The Reason", qui commence de façon apaisée avant de s'enflammer en n' oubliant jamais la mélodie. On peut aussi souligner la très très belle "White Shoes", à l'ancienne, confession mélancolique tire-larme du meilleur goût.
Le single Nikorette ressemble bien plus à Pavement ou Weezer qu'à Bright Eyes, et dévoile une power-pop lumineuse, un rock mélodique sympathique dans lequel on sent retranscrit en chanson un certain bonheur qu'aurait (enfin !) réussit à trouver Conor Oberst.
"Cabbage Town" et "Slowly (Oh So Slowly)" ont visiblement été composées exactement dans ce même esprit qui avait aussi habité l'enthousiasmant 1er single issu de l'album précédent, Souled Out !!!.
"Difference In Time", chantée par un membre du Mystic Valley Band à la belle voix grave (Jason Boesel), ressemble à une ballade country digne de The Band. Sympathique. Même chose pour le titre "Ten Women".
"Big Black Nothing" est un titre rock de bonne facture, une cavalcade pop aux guitares rangées qui laisse rêveur (qui fait penser aux Last Shadow Puppets et à Nickel Eye), chanté par un autre Mystic à la voix intéressante, à savoir le dénommé Nick Freitas.
"Bloodline" (de Nick Freitas également) sonne très pop british, sympatoche mais pas touchant pour un sou.
Un morceau rock anecdotique, "To All The Lights In The Windows", nous est même envoyé par Oberst en personne. Cette chanson ressemble à du rock anglais tellement banal... On attend plus du songwriter que certains considèrent comme le digne successeur de Bob Dylan. Serait-il tombé dans le... banalement correct ?
Un non catégorique nous est envoyé à la face à l'écoute d'un des grands morceaux de bravoure de l'album, le magnifique "Snake Hill", chanté encore une fois par un autre membre du Mystic Valley Band (Taylor Hollingsworth), mais qui semble concerné cette fois. Sa voix très nasillarde, proche de celle de Peter Perrett, et la mélodie émouvante de la chanson accompagnée par d'étranges bruits de guitares distordues sonne un peu comme du Daniel Johnston, mais en bien enregistré. C'est comme un croisement réussi de deux des plus belles chansons de Johnston : l'a-capella "Devil Town" et "Some Things Last A Long Time". On sent ici qu'il n'y a pas de volonté de coller à un style précis. D'où l'originale beauté du morceau. Ce même Hollingsworth nous pond également "Air Matress", là aussi une des meilleures chansons de l'album. Sans grande ambition, il balance ce qui pourrait être un inédit des Only Ones, à la mélodie encore une fois très belle. On aimerait bien voir ce qu'il pourrait nous faire en solo celui-là...
"Worldwide", belle ballade mid-tempo, est composée par Oberst mais chantée par la quatrième voix du Mystic Valley Band (Macey Taylor), et révèle cette fois-ci un bon goût dans le pop-rock pas original du tout mais mélodique et tout simplement joli.
"Eagle On A Pole" est une reprise de la plus superbe des ballades de l'album précédent de Conor Oberst & The Mystic Valley Band. Sans intérêt puisque toute l'émotion en est enlevée au profit d'une interprétation country middle of the road.
Au final on voit bien, si on prend toutes les chansons de l'album une par une, que l'ensemble est vraiment inégal. On a même parfois l'impression d'assister plus à une démonstration de style qu'à une œuvre réellement cohérente.
Cependant on doit bien avouer qu'il est très difficile d'en vouloir à Oberst et ses potes tant certains éclairs de génie compensent les moments de moins bien.
En gros les deux tiers de l'album sont de très bon niveau et font que ce disque reste largement au dessus de la concurrence. Mais on s'estime en droit d'attendre un peu plus du petit Conor.
Hé oui Mister Oberst, il ne fallait pas publier des albums parfaits (I'm Wide Awake, It's Morning) ou presque (Cassagada) juste avant !
Pour cet album, comme pour le précédent, exit Mike Moggis et bienvenue le Mystic Valley Band. Oberst dit avoir composé Outer South avec ses nouveaux amis lors de la dernière tournée en leur compagnie, sur la route donc. Et on ressent en effet immédiatement que ce qui nous est présenté ici est beaucoup moins introspectif et mélancolique que ce que notre petit génie a pu publier par le passé. Lui qui s'était spécialisé dans les ballades guitares-voix mélancoliques (ou dans l'expérimentation électro-rock voisine de la new-wave (voir Digital Ash In A Digital Urn)) avec des textes très personnels et particulièrement déprimés tente depuis I'm Wide Awake It's Morning, peu à peu, progressivement, de toucher à une universalité qui dépasserait les étroits carcans du folk indie.
Ici l'ambiance est tantôt country, tantôt power-pop, tantôt rock sudiste et tantôt folk. Cet album, c'est l'album sudiste du groupe, celui qui sonne américain comme jamais. Et c'est aussi un joyeux bordel que l'on tâchera de disséquer.
Première grosse surprise : Oberst a carrément laissé les "autres" composer et chanter sur certains morceaux. Le résultat est donc, comme on pouvait le prévoir, assez hétérogène, et va de l'excellent au médiocre.
Commençons tout d'abord par le brasier rock'n'roll qu'est Roosevelt Room, digne du meilleur des Stones mêlé au meilleur du Allman Brothers Band. Un truc qui déchire complètement, laissant l'auditeur pantois devant tant de savoir-faire rock'n'roll pur et dur en ces temps de musique bâtarde. Ici la place est laissée aux solos de guitares agressifs et distordus, aux claviers en folies et aux hurlements du petit Oberst, étonnamment à l'aise dans ce registre.
Autre moment fort du disque : le sublime et émouvant "I Got The Reason", qui commence de façon apaisée avant de s'enflammer en n' oubliant jamais la mélodie. On peut aussi souligner la très très belle "White Shoes", à l'ancienne, confession mélancolique tire-larme du meilleur goût.
Le single Nikorette ressemble bien plus à Pavement ou Weezer qu'à Bright Eyes, et dévoile une power-pop lumineuse, un rock mélodique sympathique dans lequel on sent retranscrit en chanson un certain bonheur qu'aurait (enfin !) réussit à trouver Conor Oberst.
"Cabbage Town" et "Slowly (Oh So Slowly)" ont visiblement été composées exactement dans ce même esprit qui avait aussi habité l'enthousiasmant 1er single issu de l'album précédent, Souled Out !!!.
"Difference In Time", chantée par un membre du Mystic Valley Band à la belle voix grave (Jason Boesel), ressemble à une ballade country digne de The Band. Sympathique. Même chose pour le titre "Ten Women".
"Big Black Nothing" est un titre rock de bonne facture, une cavalcade pop aux guitares rangées qui laisse rêveur (qui fait penser aux Last Shadow Puppets et à Nickel Eye), chanté par un autre Mystic à la voix intéressante, à savoir le dénommé Nick Freitas.
"Bloodline" (de Nick Freitas également) sonne très pop british, sympatoche mais pas touchant pour un sou.
Un morceau rock anecdotique, "To All The Lights In The Windows", nous est même envoyé par Oberst en personne. Cette chanson ressemble à du rock anglais tellement banal... On attend plus du songwriter que certains considèrent comme le digne successeur de Bob Dylan. Serait-il tombé dans le... banalement correct ?
Un non catégorique nous est envoyé à la face à l'écoute d'un des grands morceaux de bravoure de l'album, le magnifique "Snake Hill", chanté encore une fois par un autre membre du Mystic Valley Band (Taylor Hollingsworth), mais qui semble concerné cette fois. Sa voix très nasillarde, proche de celle de Peter Perrett, et la mélodie émouvante de la chanson accompagnée par d'étranges bruits de guitares distordues sonne un peu comme du Daniel Johnston, mais en bien enregistré. C'est comme un croisement réussi de deux des plus belles chansons de Johnston : l'a-capella "Devil Town" et "Some Things Last A Long Time". On sent ici qu'il n'y a pas de volonté de coller à un style précis. D'où l'originale beauté du morceau. Ce même Hollingsworth nous pond également "Air Matress", là aussi une des meilleures chansons de l'album. Sans grande ambition, il balance ce qui pourrait être un inédit des Only Ones, à la mélodie encore une fois très belle. On aimerait bien voir ce qu'il pourrait nous faire en solo celui-là...
"Worldwide", belle ballade mid-tempo, est composée par Oberst mais chantée par la quatrième voix du Mystic Valley Band (Macey Taylor), et révèle cette fois-ci un bon goût dans le pop-rock pas original du tout mais mélodique et tout simplement joli.
"Eagle On A Pole" est une reprise de la plus superbe des ballades de l'album précédent de Conor Oberst & The Mystic Valley Band. Sans intérêt puisque toute l'émotion en est enlevée au profit d'une interprétation country middle of the road.
Au final on voit bien, si on prend toutes les chansons de l'album une par une, que l'ensemble est vraiment inégal. On a même parfois l'impression d'assister plus à une démonstration de style qu'à une œuvre réellement cohérente.
Cependant on doit bien avouer qu'il est très difficile d'en vouloir à Oberst et ses potes tant certains éclairs de génie compensent les moments de moins bien.
En gros les deux tiers de l'album sont de très bon niveau et font que ce disque reste largement au dessus de la concurrence. Mais on s'estime en droit d'attendre un peu plus du petit Conor.
Hé oui Mister Oberst, il ne fallait pas publier des albums parfaits (I'm Wide Awake, It's Morning) ou presque (Cassagada) juste avant !
Bon 15/20 | par Rafael |
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