Merz
Merz |
Label :
Epic |
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Le premier album de Merz a vu le jour après de longs voyages à travers le monde entier. Brillant travail d'orfèvre post-pop, c'est un disque découvert à l'époque de sa sortie et que je suis très loin d'avoir oublié. C'est une sorte de voyage dans l'inconscient d'une planète sublimée par l'âme d'un grand enfant émerveillé.
Parlons pour commencer de la voix. Conrad Lambert, un peu à la manière de Björk, possède un organe puissant et malléable à volonté, qui se permet de toucher du doigt une infinité de styles tout en restant, par son timbre, complètement unique. Comment décrire ce timbre? Il s'agit d'une voix d'ado androgyne, pincée, parfois orgueilleuse, parfois laissant entrer un ciel limpide dans ses filets, ou poussant des trémolos à la limite de l'incantation chamanique et posée de temps en temps par un tendresse extraterrestre. Sortant de tout cadre de référence, c'est une voix qui naturellement s'apprivoise pas à pas.
Les arrangements sont incroyablement audacieux et limpides, laissant une large part à l'électronique, comme d'entrée sur "Many Weathers Apart", où un duo basse-rythme très jungle laisse Conrad poser sa voix incantatoire sur les accords délicats d'un clavier lunaire. Tout l'album soufflera le chaud et le froid entre électronique bien barrée et folk en cinémascope. "Engine Heart" en est le parfait exemple, avec sa progression rythmique de plus en plus épileptique, contrastée en parallèle par une voix et des instruments qui coulent, imperturbables, comme engourdis dans un lyrisme soyeux laissant apercevoir des décors bucoliques assez grandioses... "Lotus" et "Forsake" poursuivent dans cette veine où les extrêmes se font face pour mieux s'attirer, où les arbres millénaires et les machines modernes s'enlacent amoureusement, laissant le romantisme naïf de Conrad respirer et attendrir. Puis, on se réveille avec l'évident single du disque, "Lovely Daughter" pour une danse d'ornithologue qui aurait découvert le funk et l'art du scratching, et par là-même les films de Myazaki avant tout le monde. La pression monte ensuite dans "Cc Conscious", titre nettement plus sombre et déjanté, porté par une rythmique électro violente et syncopée... Avec ses grandes cordes romantiques, "Starlight Night" nous berce au gré de ses notes qui jaillissent telle une pluie d'étoiles filantes... Aphex Twin n'est pas loin dans "Asleep", la voix est totalement trafiquée, rythme vintage près à dérailler venant soutenir tout ça... Ensuite, curieux hommage au "Gloria" de Patti Smith dont le jeune voyageur utilise les notes de piano comme support du morceau, avant de s'envoler dans un mix à plusieurs voix strié par des arrangements de cordes gainsbouriennes et des beats semblant sortir des entrailles de la terre, voix d'oiseau déplumé s'énervant, montant et descendant dans un canevas vertigineux.
Merz vient nous repêcher au bord du lit, avec le très soul "AM Good Morning", où l'ombre du Massive Attack première période plane...
Si on ajoute que ce disque a été mixé sur un bateau du XIXème siècle dérivant sur la Tamise, on ne peux que deviner d'où vient l'ambiance liquide et extatique qui le parcourt, en dehors des voyages de cet étrange artiste solitaire, cet esthète ouvert à tout mais semble-t-il ligotable à rien.
Ecrasé par le travail collossal et le peu de succès rencontré en retour, et peu aidé par sa personnalité torturée, Merz sortira son deuxième album 6 ans plus tard... Mais c'est une autre histoire.
Note : Ce disque a été réédité le 2 avril 2007 chez Grönland.
Parlons pour commencer de la voix. Conrad Lambert, un peu à la manière de Björk, possède un organe puissant et malléable à volonté, qui se permet de toucher du doigt une infinité de styles tout en restant, par son timbre, complètement unique. Comment décrire ce timbre? Il s'agit d'une voix d'ado androgyne, pincée, parfois orgueilleuse, parfois laissant entrer un ciel limpide dans ses filets, ou poussant des trémolos à la limite de l'incantation chamanique et posée de temps en temps par un tendresse extraterrestre. Sortant de tout cadre de référence, c'est une voix qui naturellement s'apprivoise pas à pas.
Les arrangements sont incroyablement audacieux et limpides, laissant une large part à l'électronique, comme d'entrée sur "Many Weathers Apart", où un duo basse-rythme très jungle laisse Conrad poser sa voix incantatoire sur les accords délicats d'un clavier lunaire. Tout l'album soufflera le chaud et le froid entre électronique bien barrée et folk en cinémascope. "Engine Heart" en est le parfait exemple, avec sa progression rythmique de plus en plus épileptique, contrastée en parallèle par une voix et des instruments qui coulent, imperturbables, comme engourdis dans un lyrisme soyeux laissant apercevoir des décors bucoliques assez grandioses... "Lotus" et "Forsake" poursuivent dans cette veine où les extrêmes se font face pour mieux s'attirer, où les arbres millénaires et les machines modernes s'enlacent amoureusement, laissant le romantisme naïf de Conrad respirer et attendrir. Puis, on se réveille avec l'évident single du disque, "Lovely Daughter" pour une danse d'ornithologue qui aurait découvert le funk et l'art du scratching, et par là-même les films de Myazaki avant tout le monde. La pression monte ensuite dans "Cc Conscious", titre nettement plus sombre et déjanté, porté par une rythmique électro violente et syncopée... Avec ses grandes cordes romantiques, "Starlight Night" nous berce au gré de ses notes qui jaillissent telle une pluie d'étoiles filantes... Aphex Twin n'est pas loin dans "Asleep", la voix est totalement trafiquée, rythme vintage près à dérailler venant soutenir tout ça... Ensuite, curieux hommage au "Gloria" de Patti Smith dont le jeune voyageur utilise les notes de piano comme support du morceau, avant de s'envoler dans un mix à plusieurs voix strié par des arrangements de cordes gainsbouriennes et des beats semblant sortir des entrailles de la terre, voix d'oiseau déplumé s'énervant, montant et descendant dans un canevas vertigineux.
Merz vient nous repêcher au bord du lit, avec le très soul "AM Good Morning", où l'ombre du Massive Attack première période plane...
Si on ajoute que ce disque a été mixé sur un bateau du XIXème siècle dérivant sur la Tamise, on ne peux que deviner d'où vient l'ambiance liquide et extatique qui le parcourt, en dehors des voyages de cet étrange artiste solitaire, cet esthète ouvert à tout mais semble-t-il ligotable à rien.
Ecrasé par le travail collossal et le peu de succès rencontré en retour, et peu aidé par sa personnalité torturée, Merz sortira son deuxième album 6 ans plus tard... Mais c'est une autre histoire.
Note : Ce disque a été réédité le 2 avril 2007 chez Grönland.
Excellent ! 18/20 | par Sam lowry |
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