Sylvain Fesson

Sylvain Fesson pourrait être ce héros Middle Class d'une fiction française qu'on suit caméra à l'épaule dans les méandres de son existence. On l'imagine aisément dans un bus francilien, anonyme sous la grisaille, assis, l'air pensif lors d'un plan séquence mélancolique avec sa musique en illustration.

Quadragénaire banlieusard installé à Paris, journaliste, écrivain, vidéaste, poète, chanteur, Sylvain vit sa vie et s'exprime en chanson avec un certain talent, et surtout sans calcul, sur ce qu'il ressent et ce qui l'inspire.
Sur ce troisième album enregistré en collaboration avec le talentueux touche-à-tout Vivien Pézerat, qui signe les musiques et arrangements avec brio, Sylvain a sorti, peut-être sans le vouloir, un objet beaucoup plus iconoclaste et atypique qu'il n'y parait.

Plus diversifié en terme de sonorités que ses prédécesseurs, l'album Origami est composé de 9 titres de pure pop chantée en français, sans "business plan" on pourrait dire. Les paroles introspectives et le chant simple de Sylvain sonnent à la perfection pendant que les styles et influences musicales bien que très actuelles s'entremêlent jusqu'à vous perdre. Et c'est agréable car on ne s'ennuie pas une seconde : un solo de saxo sur "Origami", une boucle house sur "Ciel de Shoah", une basse légère et virevoltante sur le doux "Caprice des Dieux", des sonorités orientales sur "Parfois" ; Sylvain chante, parle, aime, se livre, exprime des sentiments sur la vie avec douceur, bienveillance et une étonnante modestie et simplicité. Il ne cherche rien, ne veut rien, ne revendique rien. Il n'y a aucune pose chez lui, ce qui par les temps qui courent est franchement plaisant. C'est de la musique populaire au sens noble du terme, travaillée, simple, honnête qui fait du bien et qui mérite beaucoup plus que le relatif anonymat qui lui est surement destiné. Sylvain raconte des tranches de vies universelles comme sur le fabuleux "L'Amour au Soleil" ode à l'amour physique à la fois sensuel, pudique et beau. Les voix féminines de Céline Wadier et Lila Lakehal reviennent régulièrement embellir le tout et donnent une forme de liant joliment splénétique, avec des chœurs ou des passages parlés toujours placés au bon endroit.

Ce disque ne révolutionne rien mais m'a séduit par surprise. Un titre par ci un titre par-là, des refrains et des gimmicks qui restent en tête, une douceur familière et ouatée, beaucoup de générosité pour au final un véritable attachement. Merci pour ce moment Sylvain et Vivien !