Lucidvox

Voilà six ans que les filles de Lucidvox publient des titres, sortent des disques, un peu plus longtemps qu'elles font de la musique. Le groupe se forme en 2013, et certaines d'entre elles touchent alors un instrument pour la première fois. Ce We Are est le premier album qui arrive à nos oreilles, hormis pour les diggers numériques qui suivent leur Bandcamp tout en russe. Rassurez-vous, elles ont une nouvelle page en anglais pour cette toute première sortie internationale.

"La raison pour laquelle nous avons appelé notre album We Are est que maintenant nous sentons que nous pouvons être nous-mêmes. Très fortes. Tant dans nos personnalités que dans le groupe."

Evidemment, ça doit être simple d'être une jeune fille en Russie. Surtout du point de vue grossier, voire caricatural, d'un petit européen. Mais quand même. L'album nous est teasé depuis le printemps, avec des singles imparables comme "Knife" ou "My Little Star", soit les deux titres qui ouvrent le disque. Difficile de faire meilleure entrée en matière. Évidemment, le chant russe a quelque chose d'inhabituel, surtout quand 86% de la prod actuelle se fait en anglais, mais cette particularité ne fait qu'amplifier le charme violent de ce disque.

Quand on lit rock psyché couplé à la musique traditionnelle, ça peut vite sentir le coup fourré, il y a de quoi être méfiant sur le papier. Mais les neuf titres de We Are auront vite fait de vous convaincre, tant les petites inventions rythmiques qui vous sautent au visage sans crier gare sont épatantes. Sans faire dans l'esbroufe ou dans la démonstration, elles ont le talent sobre de rendre addict sans trop en faire, mais avec toujours ce petit plus qui va les différencier des nombreuses formations qui jouent dans la même cour. Moins arty que Warpaint, plus rentre-dedans que Goat Girls, excentrique comme l'était The Raincoats, Lucidvox apporte ce quelque chose qui fait qu'on les remarque, un charme certain, qu n'oublie pas de sentir la bière tiède et la sueur par moment. Heureusement.

Quand on lit un peu partout que le rock est mort en 2020, pour la trente deuxième fois au moins, We Are est bien le genre de disque qui ferait taire ces gens de peu de foi.