Tall Dwarfs
Weeville |
Label :
Flying Nun |
||||
(L'auteur de cette chronique est un chieur qui ne veut pas noter la musique. Par défaut, il met 20/20 partout et cette note n'engage que ceux qui veulent la prendre au sérieux)
Un jour viendra où le monde sera complètement défait, les anges souffleront dans leurs trompettes, le Royaume de Dieu sera à portée de clic, les chiens aboieront jusqu'à l'extinction de voix et nous on aboiera jusqu'à l'extinction tout court, vous voyez le délire post-Acapulco.
Ce jour là, le Seigneur, dans toute sa splendeur, sera censé nous juger les uns après les autres. Mais bon, aussi grand soit-il, quand il travaille six jours, il se repose le septième. Du coup, je veux pas blasphémer mais je l'imagine mal éplucher nos milliards de dossiers les uns après les autres, je suis sûr qu'il va gagner du temps et nous soupeser pays par pays.
A ce petit jeu là, le jour venu, l'Italie rôtira en enfer à cause du catenaccio, de Materazzi et de Laura Pausini. La France ira au purgatoire parce que, même si on est le pays de Zizou, Platoche et Gainsbourg, on est aussi celui de Raymond Domenech et de Patrick Hernandez. La Nouvelle-Zélande, elle, quels que soient ses torts, ira straight au paradis. Parce que Chris Knox.
Chris Knox, on lui doit The Enemy (un groupe de punk kiwi irréprochable, rien à voir avec le groupe britannique du même nom), Toy Love (un groupe de new-wave plus qu'acceptable ce qui n'est pas donné à tout le monde), une carrière solo de haut vol, et Tall Dwarfs (irréprochable comme de bien entendu, mais on y reviendra, patientez un peu).
Tant qu'on y est, on lui doit pratiquement tous les premiers enregistrements du label Flying Nun Records (The Clean, The Chills, The Verlaines, Sneaky Feelings, The Stones...) vu qu'un modeste héritage lui a permis de s'acheter un 4-pistes à bande et qu'il a le coeur gros comme un tremblement de terre (1).
On lui doit le dessin de la pochette de Boodle, Boodle, Boodle, le mythique premier EP de The Clean, et tout un tas d'illustrations et de cartoons pour le label, pour des fanzines, pour des journaux...
On lui doit aussi une part non négligeable de la logistique de Flying Nun puisque c'est lui qui assurait la distribution du label à Auckland où il habitait.
Pour faire court, on peut dire que le visage de la nonne volante et celui du paysage musical néo-zélandais n'auraient pas été les mêmes sans lui.
Cette petite présentation étant faite, attardons-nous sur Tall Dwarfs, le projet qu'il aura porté pendant un peu plus de deux décennies avec son élégant comparse Alec Bathgate avec qui il avait déjà joué dans The Enemy et Toy Love.
Jusqu'ici, tout était très simple depuis leurs débuts en 1981 : on sort plein d'EPs foutraques à raison d'un par an (l'EP étant le format idéal pour un groupe Flying Nun des années 80 : c'est moins cher à enregistrer, moins cher à vendre, droit au but, pas de gras, pas de remplissage), on enregistre la plupart du temps sans batterie, on compense avec des bidouilles percussives maison, des boucles enregistrées à même la bande, du bottleneck, du piano, de la guitare acoustique ou à disto, du casiotone et tout l'arsenal bricolo-DIY qui va bientôt frapper les Etats-Unis. Et on n'oublie pas de mettre tout le monde à l'amende avec des mélodies dream catchy sous grosse influence sixties (entendre par là aussi bien les pop songs de la British Invasion que les ambiances brumeuses du Velvet).
Jusqu'ici donc, nous sommes en 1990, la feuille de route était plutôt simple. Mais voilà, un beau jour, ou peut-être une nuit, après avoir commis sept EPs en sept ans, ils décident donc de changer quelque chose et ils se lancent dans leur premier album, Weeville. Impossible de savoir pourquoi ils ont sauté le pas à ce moment là, je manque d'info. C'était ptet une envie folle, un pari débile, l'abandon du format vinyle au profit du CD, ou une ouverture business à ne pas louper, l'album ayant été distribué aux USA par Homestead qu'on ne vous présente plus.
En tout cas, ça fait seize titres aussi riches et variés que ce que deux bonhommes peuvent faire tous seuls dans leur coin avec un 4-pistes. Toute la panoplie du bon goût indé lo-fi déclinée avec nuance et inventivité.
"Tip Of My Tongue" ça pourrait être Thurston Moore enregistré par le Beck du début. "What More" a un petit côté bad boy Lou Reed baryton. "Mr Broccoli", c'est presque un guinness record de grand écart entre le titre débile d'une chanson et son potentiel mélodique (aux dernières nouvelles, "Ob-la-di, Ob-la-da" est, à ce jour, encore devant d'une courte tête). Je vous fais pas le tour du propriétaire exhaustif, prenez le temps de fouiner dans toutes les chambres, d'ouvrir tous les placards, vous verrez que c'est un endroit magique.
Amis anthropo-musicologues, si vous avez bien suivi, vous avez donc là le chaînon manquant entre la fin des années 60 et le lo-fi indé des années 80-90. Ce qui le place quelque part à la croisée de Syd Barrett, du Velvet Underground et probablement aussi de Sebadoh By Voices. On a vu pire comme mélange. Et, dans le genre, je ne suis pas vraiment sûr qu'on ait fait beaucoup mieux.
Un jour viendra où le monde sera complètement défait, les anges souffleront dans leurs trompettes, le Royaume de Dieu sera à portée de clic, les chiens aboieront jusqu'à l'extinction de voix et nous on aboiera jusqu'à l'extinction tout court, vous voyez le délire post-Acapulco.
Ce jour là, le Seigneur, dans toute sa splendeur, sera censé nous juger les uns après les autres. Mais bon, aussi grand soit-il, quand il travaille six jours, il se repose le septième. Du coup, je veux pas blasphémer mais je l'imagine mal éplucher nos milliards de dossiers les uns après les autres, je suis sûr qu'il va gagner du temps et nous soupeser pays par pays.
A ce petit jeu là, le jour venu, l'Italie rôtira en enfer à cause du catenaccio, de Materazzi et de Laura Pausini. La France ira au purgatoire parce que, même si on est le pays de Zizou, Platoche et Gainsbourg, on est aussi celui de Raymond Domenech et de Patrick Hernandez. La Nouvelle-Zélande, elle, quels que soient ses torts, ira straight au paradis. Parce que Chris Knox.
Chris Knox, on lui doit The Enemy (un groupe de punk kiwi irréprochable, rien à voir avec le groupe britannique du même nom), Toy Love (un groupe de new-wave plus qu'acceptable ce qui n'est pas donné à tout le monde), une carrière solo de haut vol, et Tall Dwarfs (irréprochable comme de bien entendu, mais on y reviendra, patientez un peu).
Tant qu'on y est, on lui doit pratiquement tous les premiers enregistrements du label Flying Nun Records (The Clean, The Chills, The Verlaines, Sneaky Feelings, The Stones...) vu qu'un modeste héritage lui a permis de s'acheter un 4-pistes à bande et qu'il a le coeur gros comme un tremblement de terre (1).
On lui doit le dessin de la pochette de Boodle, Boodle, Boodle, le mythique premier EP de The Clean, et tout un tas d'illustrations et de cartoons pour le label, pour des fanzines, pour des journaux...
On lui doit aussi une part non négligeable de la logistique de Flying Nun puisque c'est lui qui assurait la distribution du label à Auckland où il habitait.
Pour faire court, on peut dire que le visage de la nonne volante et celui du paysage musical néo-zélandais n'auraient pas été les mêmes sans lui.
Cette petite présentation étant faite, attardons-nous sur Tall Dwarfs, le projet qu'il aura porté pendant un peu plus de deux décennies avec son élégant comparse Alec Bathgate avec qui il avait déjà joué dans The Enemy et Toy Love.
Jusqu'ici, tout était très simple depuis leurs débuts en 1981 : on sort plein d'EPs foutraques à raison d'un par an (l'EP étant le format idéal pour un groupe Flying Nun des années 80 : c'est moins cher à enregistrer, moins cher à vendre, droit au but, pas de gras, pas de remplissage), on enregistre la plupart du temps sans batterie, on compense avec des bidouilles percussives maison, des boucles enregistrées à même la bande, du bottleneck, du piano, de la guitare acoustique ou à disto, du casiotone et tout l'arsenal bricolo-DIY qui va bientôt frapper les Etats-Unis. Et on n'oublie pas de mettre tout le monde à l'amende avec des mélodies dream catchy sous grosse influence sixties (entendre par là aussi bien les pop songs de la British Invasion que les ambiances brumeuses du Velvet).
Jusqu'ici donc, nous sommes en 1990, la feuille de route était plutôt simple. Mais voilà, un beau jour, ou peut-être une nuit, après avoir commis sept EPs en sept ans, ils décident donc de changer quelque chose et ils se lancent dans leur premier album, Weeville. Impossible de savoir pourquoi ils ont sauté le pas à ce moment là, je manque d'info. C'était ptet une envie folle, un pari débile, l'abandon du format vinyle au profit du CD, ou une ouverture business à ne pas louper, l'album ayant été distribué aux USA par Homestead qu'on ne vous présente plus.
En tout cas, ça fait seize titres aussi riches et variés que ce que deux bonhommes peuvent faire tous seuls dans leur coin avec un 4-pistes. Toute la panoplie du bon goût indé lo-fi déclinée avec nuance et inventivité.
"Tip Of My Tongue" ça pourrait être Thurston Moore enregistré par le Beck du début. "What More" a un petit côté bad boy Lou Reed baryton. "Mr Broccoli", c'est presque un guinness record de grand écart entre le titre débile d'une chanson et son potentiel mélodique (aux dernières nouvelles, "Ob-la-di, Ob-la-da" est, à ce jour, encore devant d'une courte tête). Je vous fais pas le tour du propriétaire exhaustif, prenez le temps de fouiner dans toutes les chambres, d'ouvrir tous les placards, vous verrez que c'est un endroit magique.
Amis anthropo-musicologues, si vous avez bien suivi, vous avez donc là le chaînon manquant entre la fin des années 60 et le lo-fi indé des années 80-90. Ce qui le place quelque part à la croisée de Syd Barrett, du Velvet Underground et probablement aussi de Sebadoh By Voices. On a vu pire comme mélange. Et, dans le genre, je ne suis pas vraiment sûr qu'on ait fait beaucoup mieux.
Intemporel ! ! ! 20/20 | par Santiagoo |
En écoute : https://talldwarfs.bandcamp.com/album/weeville
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