Nothing

Paris [Le Petit Bain] - lundi 25 avril 2022

 Nothing
J'avais tellement envie de voir Nothing sur scène que j'ai retardé d'une journée mon départ pour mes vacances en famille. Depuis que j'ai découvert ce groupe fin 2018, dans la panique de la préparation de mon top albums de l'année, je bloque sur ce curieux mélange de shoegaze mélancolique et de post-hardcore musclé. Ces derniers mois, j'ai parcouru l'essentiel de leur discographie, en faisant un peu la moue au départ à l'écoute de leurs deux premiers albums, mais même ceux-là ont fait leur trou dans la rotation de mon baladeur MP3. Et depuis la sortie fin 2020 du dernier, l'excellent The Great Dismal, j'épluche les agendas de concert en espérant une tournée européenne avec une date à Paris. Me voilà exaucé et, cerise sur le gâteau, dans une de mes salles préférées.

A l'origine, j'avais décidé de zapper la première partie, les Belges de The Waltz, après avoir écouté leur album : ce noise-rock testostéroné me rappelait un peu trop le Therapy? des débuts, un groupe que j'ai beaucoup aimé - et même vu deux fois en concert à l'époque héroïque - mais dont je ne me rappelle plus bien ce que je leur trouvais à l'époque. Je suis finalement rentré dans le (Petit) bain au milieu de leur set, à la fin d'un morceau bien bourrin, et au début de la séquence des slows, en mode Alice In Chains. Celle-ci ne dure qu'un morceau et demi avant le retour du matraquage grunge-metal. Bien qu'agacé par leur côté un peu m'as-tu-vu et leurs compositions taillées à la hache, je finis par me prendre au jeu, bluffé par leur énergie et leur maîtrise. Belgium, 1 point.

Avec mon masque sur le nez - fin de COVID oblige - je scrute la foule sans reconnaître un seul visage. Un événement rare pour le vieux routier des salles parisiennes que je suis devenu. Je suis également surpris par le calme de la foule quand Domenic Palermo, le chanteur-guitariste, entre sur scène, la tête enfouie dans son hood couleur schtroumpf, façon Kenny de South Park. Il nous tourne le dos direct pour se coller à son ampli et générer des larsens maîtrisés, installant une ambiance post-rock que ne renierait pas Mogwai, pendant que ses acolytes arrivent sur scène un par un. Les deux guitares et la basse sont à un niveau sonore légèrement plus faible que la batterie pour laisser la place aux magnifiques harmonies des deux voix haut perchées de "Nicky" et de son acolyte Doyle Martin, l'autre guitariste, qui a remplacé l'historique Brendan Setta en 2019. Le groupe est d'ailleurs en rodage : la section rythmique a été entièrement renouvelée en début d'année. Ça se sent un peu dans les transitions entre les morceaux, souvent poussives alors que ce style de musique se prête aux intermèdes planants, mais pas dans la maîtrise : certain morceaux sont aussi magiques que sur disque, du très punk "Bent Nail" à l'entraînant "Bernie Sanders", qu'on croirait écrit par The Besnard Lakes.
"Nicky" la tête brûlée s'avère un brin slacker, passant des plombes à s'accorder ou à démarrer certains morceaux, mais aussi attachant par ses tirades maladroites, nous remerciant longuement d'être venus les voir après deux années compliquées, présentant ses musiciens ou annonçant un morceau dédié aux "dead people" ("peut-être sont-ils présents ce soir").
Après un rappel salué chaleureusement, le quatuor quitte la scène. Je m'échappe rapidement pour regagner mon confinement, oubliant même de retirer mes bouchons d'oreilles en sortant de la salle. Ce petit moment volé au COVID et à ma famille n'est pas le concert le plus intense que j'ai vécu, mais il m'aura permis de faire connaissance avec un groupe décidément très sympathique.


Très bon   16/20
par Myfriendgoo


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